Secoués par la crise, bon nombre de petits entrepreneurs russes se sont reconvertis dans le commerce de la mode et du luxe de contrefaçon.
C’est le constat unanime des experts locaux, qui rappellent que le phénomène ne cesse de grandir. Déjà l’an dernier les ventes de contrefaçon dans le secteur non-alimentaire étaient estimées à près de 75 milliards d’euros, soit pas loin de 5% du PIB russe, selon les calculs du cabinet Tiar. Le cabinet parvenait à ce résultat en compilant les statistiques économiques nationales de Rosstat et celles des contrefaçons relevées par l’agence spécialisée Rospotrebnadzor. La part des contrefaçons est particulièrement élevée sur le segment des jouets (35%), celui de la mode (28%), des parfums (10%).
Vestige des périodes économiques troubles, le marché de contrefaçon n’a jamais disparu en Russie. Mais jusqu’à peu il était limité à un environnement commercial singulier, celui des grands marchés couverts logés dans d’immenses hangars, en province ce sont souvent des usines désaffectées. A l’intérieur, des vendeurs au look patibulaire se serrent entre les présentoirs où sont entassés des vêtements « de grandes marques ». Les lieux sont fréquentés par un public à faibles voire très faibles revenus.
Ces marchés vendent au gros et au détail, souvent ils servent aussi de lieu de fabrication des articles grâce aux équipes de ressortissants chinois ou vietnamiens qui s’affairent sur des machines à coudre au sous-sol, ce qui permet d’éviter les frais et les risques liés au transport. Connus pour être des plaques tournantes de la mode et du luxe de contrefaçon, les marchés couverts bénéficient d’une certaine tolérance car ils représentent une source de revenus parallèles pour la police et pour toutes les administrations chargées… de lutte contre les contrefaçons. Dans la capitale russe, les marchés couverts Sadovod, Yuzhni Vorota ou Dubrovka donnent un bon aperçu du fonctionnement de la filière.
Leurs allées sans charme auraient du mal à attirer des fashionistas sinon les plus fauchés. Pourtant le circuit de contrefaçon est en train de se développer et de rajeunir grâce à une multitude de nouveaux vendeurs qui maitrisent les canaux modernes, les marketplaces et les réseaux sociaux. Ces petits génies du commerce créent des boutiques virtuels ou ouvrent des comptes dédiés sur les réseaux, où ils proposent les mêmes articles de contrefaçon mais dans un environnement plus élaboré et qualitatif, qui rappelle le cadre des boutiques de marques. Ils s’approvisionnent en « semi-gros » dans les mêmes marchés couverts qui du coup trouvent de nouveaux débouchés pour la production réalisée dans les sous-sols… La suite de cet article est réservée aux abonnés.
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